DÉMARCHE

Démarche artistique

Né dans la petite ville de Sorel, lointaine banlieue de Montréal, j'ai vite entendu l'appel des grands espaces et de la forêt. Jeune, je me suis donc lancé à la découverte de plusieurs régions du Québec.
C'est finalement en Charlevoix que j'ai choisi de m'établir depuis près de vingt ans.

J'explore depuis de nombreuses années, l'arbre sous toutes ses formes, je le connais bien comme
individu et comme groupe. Toutefois, c’est depuis une dizaine d'années que j’approfondis mes recherches
et que je le questionne autrement. D’abord, il nous faut reconnaître cette matière noble qui compose le
squelette de cet être vivant exceptionnel. Être silencieux, il ne crie jamais sa détresse; il subit les affres
de la nature année après année, sans créer le moindre souci à ceux qui le côtoient. Cependant, il faut
savoir que toutes ces infortunes laissent des traces : champignons, fissures, nœuds, maladies, etc.

Je perçois mon travail comme la mise en valeur de l'histoire de l'arbre lorsque je prends le bois tel qu’il se
retrouve dans mon atelier : tordu, perforé, attaqué par les champignons ou autre et que je l’intègre
ou lui donne fonction dans un meuble ou une pièce artistique Depuis le début de cette aventure en
atelier, de cette relation intimiste avec le bois, j'utilise différentes techniques d'ébénisterie
pour réaliser presqu’exclusivement des pièces uniques. Alors que je ne créais que des pièces
fonctionnelles auparavant telles que (tables, armoires, bancs, comptoirs, etc.) les tableaux muraux
se sont imposés à moi pour le plaisir de laisser parler uniquement la matière sans la fonction à
travers sa texture, coloration, ses fibres.

La thématique des fractales s’est présentée à moi en cours de travail et lors de
discussions avec certaines personnes œuvrant dans le milieu des mathématiques.
Cette piste m’ouvre à maintes approches qui me fascinent et me projette encore
plus loin, car le monde des fractales estpour moi une représentation théorique de la vie sous toutes
ses formes.

Cette manière de présenter la vie m’aide à concevoir des œuvres physiques, à partir de sujets
abstraits comme le cycle de la vie ou la molécule ADN. Quoi qu’il en soit, je constate de plus en plus
que non seulement la voie de la matière est sans fin mais que de nombreux questionnements
autres viennent s’y greffer tels que la relation à l’espace, l’échelle des pièces, l’environnement,
le rôle de l’artisan au service de la matière et celui de l’artiste imposant son imaginaire.

Tout cela me garde vigilant dans mon expression, sans savoir jusqu’où vraiment cette aventure me
conduira.

Jean-François Lettre